Encore quelques lignes de code et ça allait être bon. Il avait déjà passé toutes les sécurités, il n’en restait plus qu’une avant de pouvoir passer le dernier pare-feu. Encore un peu… Il était plongé sur son ordinateur, ses doigts glissant sur les touches avec dextérité. Il était précis et rapide, ne se plantant pas dans ce qu’il écrivait. Il ne pouvait pas, n’ayant pas le droit à la moindre erreur. Pas si près du but… Encore… Allez… Et voilà. Il avait brisé la dernière sécurité. Maintenant, il ne lui restait plus qu’à copier les fichiers en piratant le disque dur. Il ne pouvait pas partir de son ordinateur, au cas où il y ait un problème. Il accélérait la vitesse de téléchargement en continuant de pianoter sur son ordinateur.

Et voilà ! Skull avait réussi son coup. Il n’y avait plus qu’à effacer toute trace de son passage. Après plusieurs minutes, il avait fini. Il ôta la clé de son ordinateur avant de l’éteindre. Bien, maintenant, il pouvait aller sortir pour prendre l’air et s’amuser un peu. S’étirant, Naru alla dans sa sale de bain pour se coiffer un coup, après s’être changé. Il prit un jean, des chaussures un peu rock, ainsi qu’un tee-shirt noir et une veste en jean. Il se regarda un coup, pour voir s’il était présentable, puis sortit de chez lui. Il sourit à ses nombreux chats, qu’il sauvait de la rue pour la plupart ou adoptait car sinon ils allaient mourir, puis il partit de son appartement. Il n’avait pas oublié de vérifier que les gamelles étaient toutes remplies d’eau, pour qu’ils ne meurent pas de soif ni fassent de bêtise pour compenser. Mais il avait confiance. Ils étaient bien éduqués.

Marchant dans les rues, les mains dans les poches, Naru sifflotait, regardant autour de lui. Que faire ? Il n’en avait pas la moindre idée. Il errait ici et là, jusqu’à arriver dans le quartier des Trèfles. Il le reconnaissait car il avait une excellente amie dans ce quartier. D’ailleurs, il passa par son petit coin où elle vivait. Ah zut… Elle n’était pas là. Il n’y avait que ses deux huskies. Il s’approcha et les caressa, leur demandant où était leur maitresse. Comme s’ils allaient répondre… Mais une idée lui revint en tête. Elle était sans doute partie faire le tour des appartements. C’était vrai qu’elle lui avait dit qu’il était temps pour elle, maintenant qu’elle avait récolté assez d’argent, pour en louer un. Bon ben tant pis. Il irait la voir plus tard, sans doute au travail. Il salua donc les chiens après une dernière caresse, et se leva, partant.

Naru continua d’errer dans les rues du quartier, les mains dans les poches. Il arriva devant un salon de tatouage et eut une idée. C’était vrai que dans la glace, il avait remarqué qu’il aurait besoin de donner un coup de jeune à son tatouage. Alors pourquoi ne pas prendre rendez-vous pour remettre de l’encre et rajeunir ses tatouages ? Il passa la porte et alla au comptoir, appuyant sur la petite sonnette qui servait à prévenir qu’il y avait un client. En attendant, il regardait autour de lui. Ca avait l'air plutôt sympa ici. S'adossant au comptoir, ses yeux parcouraient les murs, les décorations et les vitrines. Ouais... Ca avait l'air réglo.

La jeune femme termina son œuvre. Avec un léger soupir de satisfaction, elle se redressa et reposa son matériel sur l’étagère pendant que son client observait avec attention le dessin à présent gravé sur sa peau, un magnifique python. Ce n’était pas très original, certes, mais non dénué de classe. Willow lui donna les dernières instructions d’usage puis ils retournèrent au comptoir pour que l’homme règle les derniers frais.
Se retrouvant de nouveau seule, elle alla faire le ménage dans l’atelier. Elle se laissa ensuite tomber sur sa chaise et son regard se posa sur les dessins accrochés dans la pièce et ceux qu’elle voyait à travers l’encadrement de porte, sur les murs du couloir. Ils n’étaient pas tous son œuvre, la plupart était des dessins faits par son fiancé décédé. Elle aimait les avoir là où elle travaillait, cela lui rappelait ce qui la poussait à continuer les tatouages malgré la douleur que les souvenirs provoquaient. Si cela n’avait tenu qu’à elle, elle n’aurait pas pu continuer, mais elle savait qu’il n’aurait jamais accepté qu’elle arrête les tatouages, c’était son rêve, elle adorait trop dessiner, et savoir que des gens souhaitaient les exposer sur leur peau était très valorisant. Combien de personnes, au Japon, portaient leurs œuvres combinés ? Des dessins que Willow avait réalisés avec son amoureux… elle en avait des classeurs entiers remplis de photos. Mais les plus beaux étaient ceux sur sa propre peau, toutes ses œuvres à lui, toutes crées pour elle, inspirée par elle et l’amour qu’ils se portaient.

Les larmes lui montèrent aux yeux, et Willow se félicita de ne pas se maquiller lorsqu’elle partait travailler. Elle essuya doucement ses paupières en soupirant, il ne fallait pas qu’elle se laisser aller, ça non plus, il ne l’aurait pas supporté. Il lui avait souvent répété qu’il ne méritait pas ses larmes… pourtant il était bien le seul sur cette planète a les avoir jamais mérité, du moins depuis la mort de ses parents.

Brusquement, l’arrachant à ses pensées, la sonnette du comptoir retentit dans la boutique. Ah mince, elle s’était tellement perdue dans ses pensées qu’elle n’avait même pas entendu la porte s’ouvrir. Elle se leva rapidement et fila à la rencontre de son client après avoir effacé toute trace de tristesse sur son visage. Le jeune homme qui l’attendait avait un look particulier et intéressant, et c’était typiquement le genre de personne que la demoiselle appréciait ceux qui se sentaient libres de porter ceux qu’ils voulaient, pas comme ceux qu’elle avait côtoyé durant son adolescence.

- Toutes mes excuses, je ne vous avais pas entendu arriver, normalement je suis un peu plus réactive.

Un sourire accueillant étira ses lèvres pulpeuses. C’était un client qu’elle n’avait encore jamais vu, alors elle ne souhaitait pas le voir fuir parce qu’elle n’était pas attentive, ou parce qu’elle n’était pas souriante… ce n’était pas une de ses qualités principales, cependant elle se forçait un peu pour le commerce. Mais peut-être que ce serait plus aisé si elle avait une ou un secrétaire, au moins les clients n’attendraient pas seuls dans la pièce.
Elle passa derrière le comptoir.

- J’espère que vous n’avez pas trop attendu. Alors dites-moi, en quoi puis-je vous aider ?

Elle sortit machinalement son agenda et un style qu’elle commença à faire tourner entre ses doigts.

Spoiler:

Après un bon petit moment d’attente, quelqu’un arriva. Ah ! Bah enfin ! Bon, il ne savait pas combien de temps il avait attendu, et au fond, il s’en foutait en fait. Mais bon, il était content qu’on vienne s’occuper de lui. Il fit un sourire qui se voulait rassurant, pour montrer qu’il n’était pas en colère ni même rancunier. Pourquoi l’être après tout ? Quand on bossait, on avait sans doute des obligations ou des trucs du genre.

« Y’a pas de problème ! »

Elle était toute pardonnée. Pourquoi il lui en voudrait de toute façon ? Ca ne serait pas très gentil de lui en vouloir. C’était une jolie femme d’ailleurs… Et même si elle ne l’était pas, ça ne serait pas du tout sympa de la part de Naru de lui balancer un truc du genre qu’elle n’était pas sérieuse, qu’elle n’était pas pardonnable de faire attendre les clients, ect.

Enfin bon ! Il hocha la tête et remonta sa manche jusqu’au possible. On voyait très bien que le tatouage continuait dans le tee-shirt, même si on ignorait sans aucun doute où est-ce qu’il s’arrêtait enfin. Il partait de son poignet, faisait tout son bras droit et pas que d’un côté mais carrément tout autour. Et sous le tee-shirt, il continuait encore, pour s’arrêter par une tête de mort sur le pectoral.

« J’voudrais faire une retouche si c’est possible. J’le trouve un peu pâlot, alors j’aimerais vraiment lui redonner de l’éclat. Enfin, quand vous pourrez hein, parce qu’il est pas petit mon tatouage. »

Il eut un petit rire.

« Ouais, il continue sous le tee-shirt en fait. »

Bon, après, ça serait à elle de voir si elle voulait voir maintenant. Histoire de se donner un avis sans doute. Après tout, Naru doutait qu’elle ait assez de temps libre pour faire ce qu’il lui demandait. Le tatouage était bien trop conséquent pour qu’on puisse faire un petit rendez-vous surprise. Même si on faisait petit morceau par petit morceau. Ou alors, vraiment minuscule…

Enfin bon ! Mais vu qu’elle avait sorti son agenda, ça confirmait ce qu’il pensait. Elle allait sans doute lui coller un rendez-vous et devoir bloquer tout un après-midi entier pour son tatouage. Quand elle aura vu la taille de celui-ci, même si elle avait déjà vu un peu avec ce qu’il y avait sur le bras. Mais ce n’était aussi compact et rempli que ce qu’il avait sur le torse. Le tout formait un unique tatouage, certes. C’était une espèce de crâne avec comme de la fumée ou des flammes, mais avec des formes tribales en fait, quelque chose comme ça.

« Vous avez du temps libre pour me faire ça ? Si vous pouvez hein, évidemment. Sinon, c’est pas grave, y’a pas de souci, j’vous en voudrais pas si vous pensez que vous pourrez pas, faute de temps ou peut-être de capacité. J’sais pas si vous êtes dans le métier depuis un bail ou depuis quelques mois. »

Il ne voulait pas l’offenser en lui disant un truc qu’elle pourrait prendre mal, en croyant qu’il lui dirait qu’elle était nulle ou quelque chose de ce genre.