Ouuuuh... Il est quelle heure là ? 5h du matin ? Bon bah c'est l'heure hein. Pourquoi elle se lève aussi tôt ? Bah parce que c'est son boulot ! Pratique d'être cuistot quand on est insomniaque ! On ne manque pas de sommeil. On peut commencer très tôt et finir très tard. On ne sera jamais fatiguée ! Mally sauta du lit et alla se prendre une bonne douche pour se réveiller. Elle en prenait deux par jour. Une avant d'aller travailler, et une après avoir travaillé, les deux pour des raisons d'hygiène envers elle-même et les aliments.

Elle s'habilla avec un jean tout simple et un tee-shirt un peu trop grand. Et maintenant, direction la cuisine ! Il n'y avait personne, chose normale vu l'heure qu'il était. Et comme il était très tôt, c'était le moment pour aller faire le pain frais et pour travailler la viande. Une fois dans les cuisines, elle fit d’abord l’inventaire de ce qu’il y avait. Une longue liste, avant d’aller dans son magasin favori qui était ouvert la nuit. Le genre de magasin qui aliment les restaurants en fait. Son restaurant n’était pas très grand, ils n’étaient que trois. Mais c’était suffisant pour ce qu’il y avait à faire. Elle n’était pas encore prête à travers dans la haute gastronomie, et de toute façon, elle n’avait pas les moyens d’ouvrir un tel restaurant. Mally avait juste les moyens d’ouvrir ce petit restaurant qui faisait aussi les petits-déjeuners. Il était réputé pour ça… Et comme elle était hyperactive, elle n’avait aucun mal à se lever tôt et travailler jusqu’à assez tard. Au final, elle avait changé l’identité de son restaurant en en faisant une espèce de snack pour les petits-déj et les déjeuners. Les soirs, elle ne les faisait que le week-end et le vendredi, le reste lui permettant d’avoir du temps pour elle et pour aussi nettoyer le restaurant. De retour après ses emplettes, elle se mit à travailler la pâte à pain. Ce qui était bien avec Mally, enfin, en tant que chef cuisinier, c'est qu'elle tenait à la fraîcheur des plats. Ensuite, elle alla s’occuper des viennoiseries. Elle était toujours la première arrivée, ce qui était logique en tant que propriétaire. Sifflotant, elle s’amusait dans sa cuisine à préparer ses petits plats. Du moins ceux pour le petit-déjeuner. Le temps que tout cuise, elle en profita pour aller jeter les ordures à la poubelle.

Tout à coup, quelque chose l’interpella. D’habitude, il y avait cette ribambelle de chiots qui venait lui réclamer de la nourriture. Elle ne pouvait malheureusement pas les adopter, et puis, ils étaient toujours avec leur père, donc ça allait. Mais elle ne pouvait s’empêcher de s’inquiéter. Cette fois, elle vit… quelque chose de nouveau. Ou plutôt quelqu’un. Une personne humaine, avec de longues tresses violacées. Ôtant son tablier, elle s’approcha prudemment de cette jeune femme qui semblait souffrante. Finalement, Mally recula, allant chercher un verre d’eau et quelques biscuits de sa réserve personnelle. Elle s’approcha, les lui tendit, la regardant dans les yeux, enfin, si elle arrivait à les trouver…

« Ca va ? »

La soirée avait été mouvementée pour Naoto. Déjà une semaine qu’elle s’était installée dans le petit refuge d’Omi, et qu’elle avait commencé ses recherches pour trouver du travail. En vain, bien entendu, car elle n’avait aucune qualification et le fait que le monde l’effraie n’était pas à son avantage. Sans parler de son apparence macabre, qui avait plutôt tendance à faire fuir les personnes vers qui elle osait se tourner pour tenter de se faire embaucher. En même temps…elle-même avouait ne pas se donner à fond dans cette recherche. A quoi cela lui servirait-il, après tout ? Elle savait déjà que c’était peine perdue. Autant ne pas gaspiller d’énergie pour rien. Mais bref. Aujourd’hui encore, la jeune femme s’était faite rabrouer par trois pseudo patrons, et commençait vraiment à en avoir assez. Elle ne disait rien, mais n’en pensait pas moins. Surtout pour le dernier, un petit jeune qui se croyait tout permis et s’était senti assez puissant pour l’insulter au passage. Heureusement pour lui qu’il avait ses deux malabars pour le protéger, car les mains de la brune s’étaient refermées sur le petit couteau qu’elle emportait partout sur elle, vestige d’un passé plus que mouvementé dans les rues de cette île infernale. Oui, il avait vraiment eu chaud. Mais elle ne souhaitait pas en arriver là, descendre aussi bas que ses précédents agresseurs n’était pas dans ses projets d’avenir.

Bref.

Après cette journée de recherches ennuyeuses, Naoto avait décidé de se détendre dans un bar. Elle n’avait pas particulièrement beaucoup d’argent, mais savait bien où aller pour obtenir ce qu’elle voulait pour le peu qu’elle avait. Cependant, une fois de plus, elle ne sut pas s’arrêter et se retrouva complètement saoule, à la rue une fois de plus, à deux doigts de tomber d’inanition…ou peut-être pas, il ne fallait pas non plus exagérer. Elle était habituée, à la longue. Pour preuve : elle arrivait presque à marcher sans se tenir aux murs des immeubles banals qui bordaient la route. Son chez elle n’était plus très loin…plus que quelque mètres…
 
Non, c’était trop difficile. Elle s’appuya contre un mur et se laissa glisser jusqu’au sol, s’avachissant littéralement sur le trottoir. Sa tête tournait, elle ne pouvait plus continuer dans ces conditions. Tant pis. La petite brune ferma les yeux, et se laissa sombrer dans un sommeil sans rêve, emporté par le liquide vicieux qui souillait ses veines.
 
Il lui semblait n’avoir dormi que quelques minutes lorsqu’elle fut réveillée par de petits jappements. Marmonnant des jurons qu’une jeune femme ne devrait pas connaître, elle ouvrit des yeux vitreux et encore endormis pour déterminer l’origine de ce vacarme. Il s’agissait de simples chiots qui cherchaient de quoi manger… un peu agacée, Naoto fronça les sourcils et les repoussa.
 
- Virez de là, sacs à puces !
 
Les animaux ne se firent heureusement pas prier, et s’enfuirent sans demander leur reste. Grommelant un peu dans sa barbe, la petite brune tenta de se relever : en vain. Sa tête continuait de tourner, ce n’était même pas la peine d’essayer. Elle se contenta donc de se recroqueviller sur elle-même, le visage sur ses genoux, les bras entourant ses jambes. Ses yeux se fermèrent, et elle se ferma totalement au monde extérieur. Enfin elle voulut se fermer…mais c’était sans compter cette voix un peu trop forte qui la fit sursauter et grimacer en même temps. Elle releva lentement la tête, exactement comme une créature sortie tout droit de l’exorciste, et fixa la femme qui lui faisait face, à demi cachée sous ses cheveux longs. C’était quoi cette question ? Depuis quand on s’inquiétait pour elle ? Mis à part Omi, personne ne l’avait fait ici. Naoto restait très méfiante vis-à-vis des habitants de l’île. Sans répondre, sans même un regard pour ce que l’inconnue lui tendait, elle se remit dans sa position initiale, bien qu’un peu crispée du fait de se sentir observée.

Mally ne bougeait pas, restant totalement immobile, avec son verre d’eau et son petit plateau de biscuits. Elle devait avoir l’air bien idiote comme ça. Enfin, probablement. Mais qu’importait ! Elle n’allait pas laisser quelqu’un dans un sale état ! Et puis, elle était chez elle. Elle décidait de ce qu’elle faisait, elle était dans son restaurant après tout. Et les affaires marchaient bien assez pour se permettre de faire ça sans avoir de conséquences. Elle restait face à la demoiselle, qui semblait être très distante. Elle l’avait à peine regardée, juste elle. Qu’avait-elle ? Sans doute qu’elle n’allait pas bien.

« Euh… »

Que pouvait-elle faire ? Cette femme ne semblait pas prête à se laisser aider, elle avait même l’air de se complaire dans cette situation. Vu qu’elle ne bougeait pas, ni même répondait. Les minutes défilèrent, de plus en plus nombreuses. Finalement, les chiots arrivèrent. Mally eut un grand sourire, jusqu’aux oreilles, en les voyant revenir. Ils devaient juste avoir eu du retard. Vu comment ils approchaient de l’assiette de biscuits, ils avaient du être attirés par cette odeur. Mally se redressa alors, rapidement, et alla dans sa cuisine. Elle prit quelques morceaux de viande et de l’eau fraîche et un bol de lait. Trois bols en tout. Les chiots avaient besoin de lait, pour avoir plus de force. Ils avaient les dents assez fortes pour manger de la viande, mais avaient encore besoin d’une dose assez importante de calcium. Les chiots se jetèrent tous sur les bols, remuant leurs petites queues. Mally en avait des étoiles dans les yeux, souriante de voir ses petits amis aussi heureux.

Mais elle redressa la tête vers la jeune femme à l’allure macabre.

« Viens. »

Elle voulait vraiment qu’elle la suive, car elle avait compris que si elle ne la bougeait pas un minimum, la jeune femme en face ne bougerait jamais. Mally décida de tenter encore, et s’approcha. Son visage fut proche du sien, et elle vit que les yeux de la demoiselle aux piercings plus que nombreux, étaient rouges et éclatés. C’était le signe évident d’une grande consommation d’alcool ça… Et il n’y avait qu’un remède contre ça. Du moins, c’était une vieille recette de grand-mère qui donnait un bon coup de fouet aux personnes qui avaient trop consommé de cette drogue liquide. Elle se leva à nouveau alors, et revint quelques minutes plus tard avec une tasse d’une liquide qui sentait fort. C’était un mélange de café, avec un piment spécial, et un peu de menthe. Ca réveillerait quelqu’un qui n’avait pas dormi depuis une semaine ça… Revenant près de la demoiselle macabre, Mally lui tendit la boisson.

« Ca te fera du bien. »

Elle espérait qu’elle accepte, au moins pour tenir la journée. Vu son état, il valait mieux qu’elle boive la mixture de grand-mère.

« N’aie pas peur, ça t’aidera juste contre l’alcool. »

Et pour lui prouver, elle en but une gorgée. Ca ne lui ferait pas grand-chose à elle, vu son hyperactivité. Mais elle avait songé qu’elle pouvait faire la ruse du mimétisme. En voyant quelqu’un d’autre goûter et que c’était sans conséquence, l’autre faisait de même. C’était utile pour nourrir des gens ou animaux qui avaient trop peur, mais qui étaient trop faibles pour ne pas avoir besoin d’avaler quelque chose. Même une simple gorgée d’eau.

Naoto s'était mise à compter les secondes. Des gouttes de sueur commençaient à perler dans son dos, signe qu'elle était de plus en plus mal à l'aise ici. Quand cette femme allait-elle s'en aller? Peut-être devrait-elle l'inviter à se mêler de ses affaires. Cette inconnue commençait déjà à l'importuner! Tout ce qu'elle voulait, c'était de rentrer chez elle...enfin dans l'ancienne tente d'Omi, son ancien chez elle quoi. Etait-ce encore loin? De toute façon elle était vidée, plus aucun de ses muscles ne voulait répondre. Il était donc hors de question de bouger d'ici...enfin si cette femme la laissait tranquille. Dans le cas contraire, elle n'aurait pas le choix et devrait s'en aller ailleurs, s'échapper du monde.

Un jappement lui fit relever la tête; les chiots qu'elle avait chassés revenaient! Elle se retint de justesse de leur donner un coup de pied: l'expression de l'inconnue s'était éclaircie, peut-être étaient-ils à elle? Non, impossible. Quoique...Naoto la regarda nourrir les petits animaux, ceux-ci apparemment très heureux d'avoir quelqu'un pour s'occuper d'eux. La naïveté du jeune âge que de ne pas se méfier...une fois adultes, ils se débrouilleraient tout seul et tourneraient le dos à leur "nourrice".

La voix un peu masculine de l'inconnue la fit sursauter de nouveau. Elle voulait qu'elle la suive? Pourquoi? La petite brune ne voulait pas bouger. Le rapprochement soudain de la femme la fit loucher un peu et elle recula légèrement la tête avant de la fixer droit dans les yeux. "Qu'est-ce qu'il y a, tu veux ma photo?" se dit-elle intérieurement, un peu énervée d'être observée comme une bête de foire. Heureusement, l'inconnue finit par abandonner et s'en aller. Enfin! Elle avait enfin compris qu'il fallait laisser la petite femme tranquille. Oh mais non, la voilà qui revenait...avec un truc fumant et non identifié. Qu'est-ce que c'était encore? La brune se risqua à jeter un coup d'oeil dans la tasse. Quelle était encore cette horreur? Naoto plissa le nez et fronça les sourcils, reculant sa tête jusque contre le mur.

- Veux pas...

Elle avait à peine murmuré cela, de sa voix détruite par la cigarette qu'elle fumait autrefois. La blonde comptait l'empoisonner ou quoi?! Elle ne savait même pas d'où pouvait provenir un liquide pareil. Sûr, ça sentait le café et elle appréciait cela, mais il y avait un mélange dedans qui lui donnait la nausée. Peut-être était-ce aussi à cause des résidus d'alcool qui lui restaient.

Là, l'inconnue fit quelque chose auquel elle ne s'attendait absolument pas: boire cet étrange liquide! Lui montrait-elle qu'il n'y avait aucune crainte à avoir? Méfiante, Naoto fixa longuement son visage afin de déceler un quelconque changement de comportement. Rien du tout...c'était donc sauf. Elle tendit timidement une main pâlotte, attrapa la tasse et la regarda un instant. Puis, fermant les yeux, elle avala d'un seul coup tout le contenu du récipient sans prendre garde au fait qu'elle se brûlait la gorge. Ce n'était pas fameux, mais pas immonde pour autant. Juste un arrière-goût plus qu'étrange.

- Merci...

Politesse exige, elle se devait de la remercier. Surtout que ce liquide commençait déjà à faire effet: elle sentait ses forces revenir, ce qui lui permit de se remettre debout non sans aucune difficulté. La brune s'appuya au mur et attendit un instant que sa tête cesse de tourner, les yeux fermés.